LUXITH, fer de lance de la transformation numérique du secteur hospitalier luxembourgeois, joue un rôle clé dans l’interopérabilité des systèmes d’information. Malgré des avancées notables, le manque de ressources humaines freine la modernisation des infrastructures. Rencontre avec Christophe Nardin, Directeur de LUXITH, pour un point sur les défis et solutions envisagées.
LUXITH est le bras armé de la digitalisation des hôpitaux luxembourgeois. Il développe et gère une plateforme informatique mutualisée répondant aux défis de la digitalisation dans le secteur de la santé. Créé en 2012 à l’initiative des membres de la Fédération des Hôpitaux Luxembourgeois (FHL), notre groupement d’intérêt économique (GIE) a pour mission de mutualiser les projets et services des établissements hospitaliers et de favoriser l’innovation technologique.
Fort d’une équipe de 30 experts, LUXITH couvre un large spectre d’activités : infrastructures, ressources humaines, imagerie médicale, cybersécurité, protection des données, interopérabilité, facturation hospitalière, etc. En étroite collaboration avec plus de 160 contacts IT et métiers ainsi que plus de 1 000 utilisateurs, nous développons des solutions sur mesure pour répondre aux besoins spécifiques de chaque établissement.
Grâce à cette approche collaborative, nous mutualisons les efforts et les investissements, permettant ainsi aux hôpitaux, notamment les spécialisés qui disposent de moins de moyens, d’accéder à des technologies de pointe qu’ils ne pourraient financer seuls. En parallèle, nous travaillons en étroite relation avec les acteurs clés du secteur de la santé au Luxembourg (l’Agence eSanté, les ministères de la Santé et de la Sécurité sociale, le Laboratoire National de Santé [LNS], la Caisse Nationale de Santé [CNS], et à différents niveaux avec le Centre des technologies de l’information de l’État [CTIE]) pour garantir l’alignement de nos solutions avec les orientations stratégiques du pays.
À l’horizon 2030, LUXITH s’engage à accompagner les hôpitaux dans leur transformation numérique en explorant de nouvelles technologies telles que l’intelligence artificielle (IA), la signature électronique et l’hypermobilité des professionnels de santé. En complément de l’expertise juridique et du marché de la FHL, LUXITH apporte son savoir-faire technologique pour construire un système de santé plus efficient, plus sûr et plus centré sur le patient.
Où en est-on dans le projet d’interopérabilité des systèmes informatiques hospitaliers ?
Il s’agit d’un enjeu majeur pour le secteur hospitalier luxembourgeois. Nous progressons constamment dans le domaine de l’interopérabilité des données de santé. De nombreux projets sont en cours, qu’il s’agisse de relier les différents hôpitaux entre eux, de collaborer avec des acteurs externes comme l’Agence eSanté, le LNS ou le ministère de la Santé, ou encore d’intégrer de nouvelles technologies. L’interopérabilité est au cœur de nos préoccupations et constitue une priorité absolue, inscrite dans l’accord de coalition.
Nous avons mis en place une équipe dédiée, qui se consacre entièrement à cette thématique et qui ne cesse de s’étoffer pour répondre à la demande croissante. Nous avons modulé l’idée d’un système unique, très complexe à mettre en œuvre, au profit d’une approche plus flexible basée sur l’interopérabilité des systèmes et des données. Cette approche comportera, dans une première phase, la mise en place d’un « HCM » hospitalier , puis dans une seconde phase, la convergence vers un éventuel système commun. Ce choix est en adéquation avec les besoins actuels et permet de valoriser au mieux les informations recueillies.
Nous sommes également à l’avant-garde en matière de technologies de l’information en santé. Nous utilisons notamment les standards FHIR (Fast Healthcare Interoperability Resources) pour harmoniser les données médicales de manière efficace et sécurisée. Ces nouvelles technologies, que nous encourageons les hôpitaux à adopter, représentent un véritable levier pour améliorer la qualité des soins et la coordination entre les différents acteurs du système de santé.
Malgré ces avancées, le déploiement de l’interopérabilité se heurte à un obstacle majeur : le manque d’informaticiens dans les hôpitaux. Les services informatiques hospitaliers sont sous-dimensionnés et peinent à faire face à la complexification des systèmes d’information. Cette situation a des conséquences concrètes : plusieurs projets sont actuellement en attente faute de ressources suffisantes. Le problème est loin d’être nouveau, comme l’atteste une étude réalisée à la demande de la CNS datant de quatre ans, qui recommandait déjà de doubler les effectifs des services informatiques hospitaliers.
Pour remédier à cette situation, la mutualisation des ressources doit être encore plus développée. Chez LUXITH, nous avons également besoin de renforcer nos équipes. Nous avons d’ailleurs demandé à la CNS une augmentation substantielle de notre budget pour les années 2025-2026 et de doubler le nombre de collaborateurs. Nous espérons que la CNS approuvera cette demande. Chaque hôpital va aussi négocier avec la CNS pour améliorer son standing informatique et ainsi répondre aux besoins croissants en matière de digitalisation.
Lire aussi: HCM : un élément clé de la transformation numérique du système de santé luxembourgeois.